Curriculum Vitae de Jean-François Perrot

Professeur émérite, Université Pierre et Marie Curie (Paris-6)

Personnel :
Carrière :
Activité professionnelle
A . Recherches et direction de recherches
  1. A.1 - Théorie des automates :
  2. A.2 - Lisp et les langages à objets :
  3. A.3 - Représentation de connaissances :
B . Enseignement
  1. B.1 - Avant 1980 (départ au Canada).
  2. B.2 - De 1981 (retour du Canada) à 1992 (départ en Italie)
  3. B.3 - De 1993 (retour d'Italie) à l'an 2000
  4. B.4 - 2000 - 2003 avec la nouvelle licence
C . Administration et responsabilités collectives
  1. C.1 - Responsabilités mineures :
  2. C.2 - Responsabilités lourdes :
Conclusion
Activités ultérieures

Personnel :

Né le 11 mai 1941 à Tunis

X 61 (sortie en 1963)

Docteur ès-Sciences Math., Paris VI, 1972

Carrière :

1963-64 Sous-lieutenant d'Artillerie, Direction de la Recherche et des Moyens d'Essai (DRME, aujourd'hui DRET)

1964-65 Stagiaire de Recherche au CNRS

1965-68 Assistant à l'Institut de Programmation, Faculté des Sciences de Paris

1968-73 Maître-Assistant ibidem

1973-77 Maître de Conférences (= Professeur de 2ème classe) à l'Université Paris VI,

1977-... Professeur à titre personnel (= Prof. de 1ère classe).

1980-81 Professeur en visite/Visiting Professor au Canada (Université du Québec à Trois-Rivières, puis Western Ontario University)

1986-1992 Directeur du Laboratoire Formes et Intelligence Artificielle (LAFORIA), UA 1095 du CNRS

1988-89 Administrateur provisoire de l'UER d'Informatique, puis directeur de l'UFR 922 de l'Université Paris VI

1995-1996 Président de la Société des Personnels Enseignants-Chercheurs en Informatique de France (SPECIF)

1996-98 Chargé de Mission auprès du Président de l'Université (Jean Lemerle)

1997-98 Directeur du Laboratoire d'Informatique de Paris 6 (LIP6), UMR 7606 du CNRS

Membre de l'AFCET, de la SMF, de la GI (Gesellschaft für Informatik) et membre du bureau de l'AFIA (Association française d'Intelligence Artificielle).

 

Activité professionnelle

Mes activités professionnelles se répartissent en trois périodes :

- 1964 - 1977 : théorie des automates (dans la mouvance de M.P. Schützenberger)

- 1977 - 1986 : langages de programmation (sous l'influence de P. Greussay : Lisp, Smalltalk)

- depuis 1986 : intelligence artificielle (représentation des connaissances, direction du LAFORIA, puis du LIP6).

Les dates de 1977 et de 1986 ne sont qu'indicatives. Elles ont été choisies par coïncidence avec des événements bien datés (1977 : nomination comme professeur, 1986 : direction du LAFORIA).

La première période est la seule qui ait donné lieu à une série de publications substantielle. La seconde a été consacrée à la direction de thèses et à l'enseignement, la troisième y a ajouté diverses responsabilités, dont la direction d'un laboratoire associé au CNRS. Je présenterai néanmoins l'ensemble de mon travail suivant la division traditionnelle Recherche / Enseignement / Administration.

A . Recherches et direction de recherches

A.1 - Théorie des automates :

J'ai d'abord travaillé sous la direction de M.P. Schützenberger sur les automates finis, plus particulièrement sur ceux qui sont associés aux codes préfixes finis, et pour être tout-a-fait exact, sur les sous-groupes maximaux des idéaux minimaux (groupes dits de Suschkewitsch) de leurs monoïdes de transitions (qui sont aussi les monoïdes syntactiques des codes). L'idée est que la structure du code se reflète assez fidèlement dans celle du groupe. J'ai démontré quelques résultats dans cette direction (qui ont constitué l'essentiel de ma thèse d'état, 1972), qui ont été reproduits presqu'intégralement dans un livre de G. Lallement [Semigroups and Combinatorial Applications, Wiley, 1979.]. Mais, les travaux immédiatement postérieurs de D. Perrin sont venus ruiner les conjectures qui laissaient espérer une théorie d'une architecture comparable à celle de la théorie de Galois.

Je me suis ensuite tourné vers l'approche de S. Eilenberg , visant non plus les langages pris individuellement mais les familles de langages, ou du moins certaines d'entre elles, appelées variétés. J'ai caractérisé les variétés les plus petites sous diverses hypothèses de fermeture (article dans Theoretical Computer Science, 1978). Cette ligne m'a fait rencontrer l'école américaine de John Rhodes, d'où a suivi une très féconde collaboration Californie - Canada - France, qui a duré des années. C'est elle qu'a suivi Jean-Eric Pin pour sa thèse d'Etat (1981 - sa thèse de 3ème cycle, en 1978, avait été consacrée à une étonnante conjecture de Cerny sur la synchronisation des automates, qui - à ma connaissance - reste ouverte).

Parallèlement, j'ai cherché à bâtir une théorie des monoïdes syntactiques pour les langages algébriques (alias context-free), d'où un article dans Acta Informatica (1977), et surtout le point de départ des travaux de Jacques Sakarovitch (thèse 3ème cycle, 1976, thèse d'Etat, 1979).

Pour mémoire, je mentionnerai ici mon travail sur l'analyse syntaxique, qui s'est surtout orienté vers mes cours de licence, mais a aussi eu comme résultat la thèse de troisième cycle de T. H. Hua (1982). J'ai également eu à considérer d'autres familles de langages que les rationnels et les algébriques à l'occasion de la thèse de François Rodriguez (Toulouse, 1975), qui portait sur les automates à compteurs.

Bilan : L'héritage de Schützenberger a été transmis avec incrément, j'ai obtenu quelques résultats précis, il reste une conjecture intéressante (sur les doubles décompositions des codes), mes programmes APL de calcul des monoïdes ont été repris et développés par la suite. En témoignent une trentaine de publications, une certaine notoriété (invitations, visites, conférences invitées etc.) et surtout deux élèves : J.E. Pin et J. Sakarovitch, tous deux actuellement directeurs de recherche au CNRS.

A.2 - Lisp et les langages à objets :

a) Sitôt après ma thèse, je me suis mis en quête d'une diversification de mes activités. J'ai cherché à tirer au clair les rapports entre Lisp et le lambda-calcul, sujets qui à l'époque étaient fort mal connus en France. J'ai rencontré Patrick Greussay et j'ai essayé de comprendre ce qu'il faisait. J'ai donc suivi d'assez près la rédaction de sa thèse (1977). Je pense avoir joué un rôle positif dans cet "accouchement", et je crois avoir fait œuvre utile. Nous formions avec Bernard Robinet un trio qui présentait "Lisp et lambda-calcul" en divers lieux, notamment à Toulouse - d'où est sorti le Lisp toulousain, puis les travaux sur Plasma et les acteurs, qui se poursuivent "parallèlement" - et en Algérie. Un des grands moments de cette collaboration fut une Ecole INRIA organisée à Toulouse en 1978 sur l'interprétation et l'implémentation de LISP. La doctrine que j'ai élaborée à ce moment a fait l'objet de ma communication à l'Ecole de Printemps du LITP sur le lambda-calcul en 1978 : elle paraît aujourd'hui d'une évidence limpide, mais à l'époque elle a aidé pas mal de gens à y voir plus clair.

J'ai ensuite secondé l'action de Greussay en partageant avec lui un cours de DEA dès 1978 et en prenant des directions de thèses propres à étendre mes compétences : notamment Eugène Neidl (compilation de Lisp) et Pierre Cointe (Smalltalk). Le travail de Neidl s'est ensuite inscrit dans la perspective industrielle du projet MAIA du CNET et de la CGE-Marcoussis, puis chez ILOG. Le projet MAIA a donné lieu à des échanges féconds avec ma petite équipe, dont les conséquences lointaines se font encore sentir dans les travaux de Testard-Vaillant.

La thèse de 3ème cycle de Cointe a été consacrée à Smalltalk, sur une idée lancée par P. Greussay, dès 1982, à un moment où ce langage restait bien mystérieux. Elle a eu un vif succès et a joué un rôle non-négligeable dans la diffusion de Smalltalk en France. Elle s'est prolongée en une brillante thèse d'Etat (1985), à la suite d'une recherche exemplaire menée à l'IRCAM, et dans une activité intense qui s'exprime actuellement dans l'équipe mixte RankXerox - LITP, avec laquelle j'entretiens des contacts étroits, et dans un projet du GRECO Programmation Méthodologie del programmation par objets .

b) En 1980-81 j'ai passé une année en détachement (la France ignorait encore l'année sabbatique) au Canada (6 mois au Québec, à Trois-Rivières, Université du Québec, et 6 mois en Ontario, à London, University of Western Ontario). Mon but était d'y chercher des moyens de calcul pour compléter le "virage" que j'avais pris depuis plusieurs années vers une activité expérimentale. J'ai donc passé mon temps à programmer en divers langages (au Québec, en Pascal sur Cyber, en Ontario, en Lisp et en Prolog sur PDP-10), et j'ai pu commencer à mettre en œuvre pour mon compte les idées de Greussay. J'y ai trouvé une source de jouvence et de renouvellement qui m'a alimenté juqu'ici.

A mon retour, les conditions de travail à Paris avaient compètement changé, avec le fonctionnement de Transpac et l'arrivée de Multics et des Vax. J'ai donc pu poursuivre sur ma lancée canadienne, et achever mon virage vers les langages de programmation.

c) Le cours de DEA 1981-82 (consacré à Prolog, que j'avais rencontré au Canada) m'a fait prendre 6 thésards d'un coup, plus un hérité de Robinet. Leur travail s'est alimenté à plusieurs sources, dans une collaboration dont le point fort était le groupe de travail du jeudi :

- Le projet de machine-Lisp MAIA, à la CGE, où se trouvait E. Neidl.

- Le projet FORMES, à l'IRCAM, où opérait P. Cointe.

- Les activités orientées vers l'Education Nationale (cours aux P.E.N.)

- Le GRECO programmation (projet VLisp de P. Greussay).

Il en est dûment résulté 7 thèses de 3ème cycle :

- Olivier Ravelomanantsoa (1985 : Gedanken et Plasma), parti dans l'industrie.

- Isabelle Borne (1984 : LOGO et Micro-Smalltalk sur le Micral-80) aujourd'hui à Vannes, après Paris-V et l'École des Mines de Nantes.

- Jean-Pierre Briot (1985 : Instanciation et Héritage dans les Langages à Objets, avec P. Cointe) aujourd'hui directeur de recherches au CNRS, habilité à diriger des recherches en 1989 .

- Bernard Serpette (1984 : parallélisme et objets, avec P. Cointe), chercheur à l'INRIA.

- Patrice Boizumault (1985 : interprétation de Prolog), auteur d'un livre remarquable, actuellement à Caen, après Montréal (UdM) et l'École des Mines de Nantes, habilité à diriger des recherches (janvier 1991).

- François-Xavier Testard-Vaillant (1985 : interprétation de Lisp sans machine abstraite), qui fut Maître de Conférences à l'ENS Fontenay, habilité à diriger des recherches (13 mars 1991).

- Jean-Pierre Regourd (1985 : système d'EIAO) , à présent Maître de Conférences à Nice, après un long séjour à la CGE-Marcoussis.

d) L'année suivante (82-83) vit le lancement du travail de Jean-Jacques Lacrampe, dont la thèse sur MANENS, le langage défini par François Le Berre pour MANipuler des ENSembles, en 1985, s'est prolongée en une équipe de recherche à Orléans (S3L, soutenue par un projet du GRECO Programmation).

e) Puis, les nouveaux étudiants ont été placés directement sous la responsabilité de chercheurs plus jeunes (p.ex. Olivier Danvy avec E. Saint-James) et mon activité a été absorbée par le fonctionnement de l'équipe et par l'enseignement. C'est à cette époque que j'ai commencé à m'intéresser à l'intelligence artificielle en suivant le travail de Robert Voyer sur les moteurs d'inférences, que j'ai poussé à écrire un livre sur la base de son rapport de DEA (Moteurs de systèmes experts , chez Eyrolles).

Bilan : Une dizaine de thèses, un groupe d'élèves, cinq projets de recherche significatifs (P. Cointe, F.-X. Testard-Vaillant, I. Borne, P. Boizumault et J.-J. Lacrampe), dont certains ont continué avec des interactions fécondes (récemment, la thèse de Vincenzo Loia, fruit d'un croisement entre la ligne de Testard-Vaillant et celle de Boizumault). Surtout, le sentiment d'avoir participé à un changement radical du paysage français en matière de programmation.

En particulier, Pierre Cointe m'avait fait rencontrer Jean Bézivin, à la suite de sa tentative (réussie, mais pas suivie) de portage de Smalltalk-80 sur la SM-90. Je les ai encouragés à créer un groupe AFCET sur la programmation par Objets, qui s'est manifesté par une série de réunions aboutissant au Colloque international ECOOP (European Conference on Object-Oriented Programming), désormais annuel, et dont la session 90 s'est tenue conjointement avec son homologue américain OOPSLA à Ottawa. Je pense avoir, pour une part modeste et obscure, contribué au succès de ce développement. D'une manière plus évidente, j'ai fait partie plusieurs années1989 du comité de programme du colloque TOOLS (Technology of Object-Oriented Languages and Systems).

A.3 - Représentation de connaissances :

Mon arrivée au LAFORIA en 1986 a eu pour conséquence un changement d'orientation : j'ai dû passer de Lisp, Prolog et Smalltalk, langages orientés vers l'intelligence artificielle, à la pratique de l'IA elle-même. J'ai d'abord exploré la programmation par règles de production, en écrivant quelques bases de règles en SNARK, suivant les préceptes de Jean-Louis Laurière. Puis je suis revenu à la programmation en Smalltalk, d'autant plus que j'ai pu enfin avoir à ma disposition une station de travail SUN.

Deux sollicitations extérieures sont d'ailleurs venues me stabiliser dans cette direction :

- l'invitation qui m'a été faite de participer à l'enseignement de Smalltalk, avec Cointe et Bézivin, lors de la 16ème Ecole internationale d'Informatique de l'AFCET à Montréal en juillet 1986.

- le suivi du projet ECCAO (Etablissement de Cahiers des Charges Assisté par Ordinateur), dont j'ai été chargé, conjointement avec Michel Galinier. Ce projet a été lancé par Thomson-DSE avec la collaboration de Paris-8 et de Paris-13, il a duré du 1.1.87 au 30.6.88. Il s'agissait d'un projet ambitieux où différents formalismes de spécification en usage dans l'industrie (p.ex. SADT) devaient être fédérés sur la base d'une représentation de connaissances assurant leur inter-traductibilité. Le logiciel de base retenu était Smalltalk-80. Son animateur était Robert Bourgeois, qui a ensuite soutenu une thèse sous ma direction.

J'ai constitué une petite équipe (F. Wolinski, R. Voyer, F. Pachet, R. Bourgeois) qui cherchait à construire des systèmes de représentation de connaissances en Smalltalk-80. Cette équipe avait des accointances au CEMAGREF (Isabelle Alvarez). L'idée était (elle est toujours, d'ailleurs) que Smalltalk fournit déjà une structure de représentation non négligeable, et qu'il est intéressant à la fois du point de vue conceptuel et du point de vue expérimental (réalisation de gros systèmes par simple assemblage) de l'exploiter à fond au lieu de la traiter comme un pur outil de programmation. Cette exploitation a suivi en gros deux axes, celui des concepts et celui des règles.

L'axe "concepts" est balisé par les thèses de Wolinski (septembre 90) et de Bourgeois (décembre 90). La première étudie les relations entre les hiérarchies de parties et les points de vues mutiples, avec implémentation en Smalltalk et application à la représentation de robots (elle a été effectuée dans le cadre du groupe de robotique d'EDF à Chatou). La seconde, issue à long terme du projet ECCAO, propose une nouvelle algèbre de concepts, implantée en Smalltalk.

L'axe des règles est marqué d'abord par la thèse de Voyer (passée en février 89) qui a déblayé le terrain et proposé un système assez aventureux, au contrôle entièrement réparti. Elle sera suivie par celle de Pachet, dont le travail a commencé par une critique du système de Voyer et s'est poursuivi par une refonte du système OPUS de Laursen & Atkinson (1987). L'idée est de pouvoir appliquer les règles à n'importe quel objet Smalltalk, de préférence défini auparavant et sans rapport avec elles (réutilisation de connaissances représentées par structures).

Il est trop tôt pour tirer un bilan.

B . Enseignement

B.1 - Avant 1980 (départ au Canada).

A partir de 1970 environ, je n'ai plus fait (ou presque) de travaux dirigés, mon service n'a comporté que des cours. J'ai assuré trois types d'enseignements :

a) en Licence (modèle de la réforme Fouchet) : le certificat C1, que j'avais hérité de Schützenberger. Il s'agissait essentiellement de combinatoire et d'algorithmique non numérique (graphes, grammaire, analyse syntaxique). Je me suis efforcé de donner un caractère expérimental à ce cours, en insistant sur la programmation effective des algorithmes (en Algol-60) et sur les projets. J'ai rédigé un polycopié sur les algorithmes de graphes. Ce cours semble avoir exercé une certaine influence.

b) en Maîtrise : cours de théorie des langages (automates finis).

c) en DEA à Toulouse (dès la fin des années 60 !) : analyse syntaxique . C'est au cours de ces activités toulousaines que j'ai eu à diriger la thèse de 3ème cycle de François Rodriguez (sur certains langages et automates).

En DEA à Toulouse et à Paris (fin des années 70) : Lisp et lambda-calcul (voir le paragraphe précédent, section "recherche").

B.2 - De 1981 (retour du Canada) à 1992 (départ en Italie)

Les conditions de travail ayant radicalement changé à l'Institut de Programmation avec la connexion au Multics de Rennes (avant l'arrivée de celui du CICRP), et plus généralement avec l'arrivée de moyens de calcul utilisables, je me suis lancé dans deux entreprises :

a) Un module de Licence (M3 dans le modèle parisien rénové) intitulé "Logique et programmation", où j'ai essayé de construire de fond en comble un enseignement selon mon cœur, comportant pour l'essentiel une introduction aux langages de programmation , avec (dans sa forme finale, 8 ans après) : introduction à la compilation, programmation récursive et dérécursivation, logique et preuves le programmes par la méthode de Hoare. Ce cours se matérialisait non par un polycopié, mais par un ensemble de répertoires sur Multics avec fichiers de texte, de programmes exécutables, de jeux d'essai, d'exemples et d'exercices, le tout assorti du service de courrier et d'un "continuum" étudiants-enseignants, constituant un instrument pédagogique d'une redoutable efficacité. J'ai notamment été frappé par la facilité avec laquelle les étudiants faisaient des preuves de programmes dès lors qu'ils avaient à leur disposition un démonstrateur automatique pour les guider.

La construction de ce cours et de son environnement sur Multics a absorbé une grande part de l'énergie que j'avais rapportée du Canada. C'est en élaborant ce cours que j'ai été amené à aider Jean Berstel à écrire le livre Multics, Guide de l'Usager, publié chez Masson (trop tard, hélas : le système a été retiré de l'usage l'année suivant la parution de notre ouvrage).

b) en Maîtrise et ailleurs : introduction à Lisp et à la programmation applicative. Basé sur les idées de Greussay, cet enseignement s'est fait en Maîtrise (Informatique, aussi en Mathématiques), en DESS, en DEA, et dans les cours d'initiation à l'Informatique pour les Professeurs d'Ecole Normale organisés à Paris-VI par Max Fontet.

c) en DEA, j'ai d'abord poursuivi mes cours de Lisp dans le DEA LAP, que j'ai quitté en 1985, l'absence de machines pour les étudiants rendant l'enseignement assez ingrat. Sur l'invitation de J.-C. Simon, j'ai inauguré un enseignement de programmation avancée à l'usage des étudiants du DEA IARFAG, option MISI située à l'Ecole des Ponts et Chaussées (ENPC) - qui disposaient de moyens de calcul, eux. Cet enseignement a duré jusqu'en 1992. Au début, il était essentiellement basé sur Lisp, avec application à la programmation par objets. En 1989 j'ai décidé de changer et de me baser exclusivement sur Smalltalk-80, disponible sur les SUNs de l'ENPC, pour mettre mon cours en contact plus direct avec mes activités de recherche. Mon équipe de recherche au LAFORIA est issue de ce cours.

d) La Licence à Paris VI a subi une refonte complète à la rentrée 89, avec des unités semestrielles. Mon ancien module M3 décrit en a) a donc disparu, remplacé en partie par un module obligatoire "introduction à la compilation" (cours aux deux sections) que j'ai assuré jusqu'à l'arrivée de Bernard Lorho en 1992 (à cette époque, le langage d'implémentation était Pascal). En outre, j'ai proposé la création de deux modules facultatifs "Lisp et théorie de la programmation" et "Prolog et logique" faisant "redescendre" en Licence des enseignements que j'avais élaborés autrefois en DEA, puis en DESS.

B.3 - De 1993 (retour d'Italie) à l'an 2000

Ayant quitté la direction du LAFORIA, je consacré pendant quelques années plus d'énergie à l'enseignement.

a) En DEUG je suis allé prêter main-forte pendant deux ans à Michèle Soria dans son entreprise de rénovation de la filière MIAS. J'ai eu le plaisir de travailler avec une équipe enthousiaste. Il est sorti de cette expérience un livre Initiation à la programmation par Word et Excel, qui poursuit sa carrière.

b) En Licence, j'ai repris le cours de compilation avec cette fois Caml Light comme langage d'implémentation.

c) En Maîtrise, j'ai proposé un nouveau cours de programmation par objets fondé sur la pratique d'Eiffel

d) En DESS-GLA cours Lisp

e) En DESS-IA cours Smalltalk

L'année 2000 a vu la mise en chantier d'une nouvelle formule pour la licence

B.4 - 2000 - 2003 avec la nouvelle licence

a) en Licence et en MIAIF, cours (obligatoire) de Compilation en C (gros travail d'organisation et de
rédaction)
b) en Licence : participation au cours optionnel de Programmation par objets (Java).
c) en DEUST Multimédia : Visual Basic, Java et langages de scripts.

C . Administration et responsabilités collectives

C.1 - Responsabilités mineures :

a) J'ai toujours assuré au fil des années un certain nombre de responsabilités, par exemple :

- élu au Conseil de l'Université, au Conseil scientifique idem, et au Comité Consultatif des Universités ;

- président de la Commission de Spécialité et d'Etablissement, puis président de la Commission des thèses.

- délégué aux thèses par le Conseil scientifique de l'UFR.

b) Actions plus spécifiques :

- Rédacteur en chef de la revue de l'AFCET "Informatique théorique", alias Revue mauve, avec M. Nivat, de 1974 à 1984 (à peu près). C'est J.E. Pin qui a pris la suite.

- Organisation scientifique de la 3ème Ecole de Printemps du LITP (Vic-sur-Cère, 1975), sur les monoïdes syntactiques finis.

- Organisation des stages d'initiation à l'Informatique pour les Inspecteurs départementaux de l'Education nationale (I.D.E.N.) 1984-86

- Organisation (avec Marc Bergman) d'une Université d'été européenne sur "Langages informatiques et Enseignement", à Nice en juillet 1984, et (à sa suite) d'une action de coopération européenne P.E.L.A.G. aboutissant à Atelier sur l'Implémentation de LOGO à Paris en octobre 1985.

- Membre du Conseil scientifique du LIPN (Laboratoire d'Informatique de Paris-Nord), depuis sa création par D. Kayser en 1985 .

- Vice-Président (1989-90), puis membre du bureau (1990-91) de l'AFIA (Association française d'Intelligence Artificielle).

- Membre (voire président) de comités scientifiques pour l'évaluation de laboratoires CNRS (LIPN et I3S), et de l'INRIA (programme

c) Animation de la recherche :

En tant que théoricien des automates, j'ai eu lors de la création du LITP la responsabilité de l'équipe n° 1 "Informatique algébrique". C'est en cette qualité que j'ai poussé à la réalisation d'un ouvrage collectif sur les techniques utilisées par Schützenberger et par ses élèves. Cette entreprise a été menée à bien par mon successeur à la tête de l'équipe, D. Perrin, sous le nom collectif de M. Lothaire, avec pour titre Combinatorics on Words.

Puis je suis passé à l'équipe n° 2 du LITP , "Programmation", et j'ai œuvré pour que se développe une activité expérimentale de qualité, avec B. Robinet, J. Berstel et M. Fontet.

C.2 - Responsabilités lourdes :

a) Direction de l'Institut de Programmation (1988-89)

Au départ de Daniel Etiemble en 1988, une crise de succession m'a conduit à accepter d'être administrateur provisoire de l'UER, puis directeur de l'UFR, pour un an (88-89), avec une décharge de service (en principe) complète. J'ai essayé de mettre en place un système de rotation des responsabilités pour éviter ce genre de situation, chaque directeur restant en fonctions un an seulement, sa succession étant normalement assurée par son directeur-adjoint. Ainsi, les décisions de fond sont prises à froid, sans la pression de l'urgence, et les votes "officiels" n'en sont que la confirmation. Mon successeur a été Guy Pujolle (89-90), suivi par J.-Ch. Pomerol (90-91), puis par Catherine Roucairol en 91-92.

b) Direction du LAFORIA (1986-92)

En 1986, j'ai pris la direction du laboratoire Claude-François-Picard, associé au CNRS, dirigé jusque-là par J. Pitrat, sur sa proposition. Le laboratoire en question traversait une période difficile, notamment dans ses relations avec le CNRS. En prendre la responsabilité représentait à la fois une prolongation logique de mon évolution précédente et un défi nouveau. J'ai pensé que je pouvais lui apporter des idées intéressantes (par rapport à son acquis) et contribuer à le remettre à flot. J'ai donc quitté le LITP et j'ai changé une nouvelle fois d'orientation, tout en gardant des liens étroits avec mes collègues et anciens élèves.

La dénomination en vigueur ne présentant pas les qualités "médiatiques" souhaitables pour l'image de marque du Laboratoire, sur la suggestion de Marc Bergman j'ai proposé de l'appeler "Laboratoire Formes et Intelligence Artificielle", en abrégé LAFORIA. Ce nom a été bien accepté de la communauté. J'ai consacré pendant 6 ans l'essentiel de mon énergie à lui donner un maximum d'éclat, en essayant de mettre sur pied une structure administrative efficace et en poussant l'animation de la vie scientifique dans de nouveaux locaux accordés par le président M. Garnier (la barre 46-00 2ème étage, cadre idéal vu la taille du laboratoire). J'ai essayé en particulier de stimuler mes collègues vers des contacts industriels, directs ou indirects (via des organismes bien armés comme l'ONERA). D'autre part, le LAFORIA participait à l'Institut Blaise-Pascal, qui regroupait les labos d'informatique associés au CNRS de Jussieu (Paris 6 et 7 : LAFORIA, LADL, LITP, MASI).

Le LAFORIA regroupait une cinquantaine de chercheurs, d'enseignants et de boursiers, et presque autant de thésards et stagiaires "externes". L'amélioration certaine de l'image du laboratoire est attestée par des recrutements nouveaux et par le fait que son association au CNRS a été renouvelée sans difficulté au 1er janvier 1991, pour 4 ans. De manière à ne pas mêler les problèmes de succession à ceux du renouvellement de l'association au CNRS, j'ai choisi de quitter la direction à mi-parcours, en octobre 1992, et j'ai transmis le flambeau à Jean-Charles Pomerol. Cette transition s'est faite sans rupture : "deux directeurs, mais une seule direction". Jean-Charles a ensuite conduit le LAFORIA jusqu'à sa fusion dans le LIP6, en 1997 - mais ceci est une autre histoire.

c) Responsabilité du DEA IARFA (1987-91)

Le DEA "Intelligence Artificielle, Reconnaissance des Formes et Algorithmique Graphique", en abrégé IARFAG, créé et dirigé par J.-C. Simon, avait une structure complexe (co-habilitation avec l'Ecole des Ponts [ENPC] et l'ENSTA) et un gros effectif (de l'ordre de la centaine d'inscrits). Prévovant de prendre sa retraite, Simon a souhaité me passer la direction de son DEA peu de temps après mon arrivée au LAFORIA. Ce changement est devenu manifeste lors de la demande de nouvelle habilitation qui a eu lieu en 1989. A cette occasion, un certain nombre de modifications ont été entérinées et le nouveau DEA s'appelle "Intelligence Artificielle, Reconnaissance des Formes et Applications". Notamment, l'Université Paris-V est à présent co-habilitée. En pratique, je partageais la direction avec N. Cot, mais comme Paris-VI était l'université du siège, j'étais le seul responsable "officiel".

L'action que j'ai menée en tant que responsable du DEA s'est traduite notamment par une augmentation substantielle du nombre de bourses MRT (de 4 en 1987 à 8 en 1990). Elle a aussi amorcé différentes réformes et mises à jour, que mon successeur Jean-Gabriel Ganascia a poursuivies et amplifiées.

d) Présidence de SPECIF (1995-96)

Après mon retour d'Italie en 1993, Norbert Cot et François Rodriguez m'ont proposé de prendre des responsabilités dans la direction de l'association des informaticiens universitaires SPECIF. J'ai été élu au CA pour trois ans en décembre 1993, où je suis devenu vice-président, puis président en 1995, succédant à Claude Girault.
La présidence de SPECIF est une tâche difficile, à laquelle j'ai consacré le meilleur de mes capacités. Je l'ai quittée au terme de mon mandat à la fin de 1996, car la direction du LIP6 et mes fonctions auprès du président de Paris 6 ne me laissaient plus la disponibilité nécessaire. C'est Max Dauchet qui a pris la suite. Le Bulletin n° 36, de juillet 96, a publié un texte qui donne mon analyse de la situation à cette époque.

e) Chargé de mission auprès du Président J. Lemerle

Notamment préparation du contrat quadriennal 1977-2000 Chargé de l'info.

f) Création et direction du LIP6 (1996-1998)

Depuis le milieu des années 80 jusqu'en 1996 la recherche en informatique à Paris 6 était organisée par l'Institut Blaise Pascal, fédération de laboratoires CNRS dirigée par Jacques Sakarovitch (LADL, LAFORIA, LITP et MASI). Cette fédération était commune à Paris 6 et à Paris 7, le LITP étant lui-même, en tant que laboratoire, commun aux deux universités. Elle a en 1996 traversé une crise au terme de laquelle une nouvelle organisation s'est mise en place. Conformément aux vœux convergents des responsables du CNRS, du Ministère et de la présidence, le LAFORIA, le MASI et deux équipes du LITP (programmation et calcul formel) se sont regroupées en un seul laboratoire qui a logiquement pris le nom de Laboratoire d'Informatique de Paris-6, alias LIP6. De par ma position auprès du président, j'ai été amené à en prendre la direction. Les autres équipes du LITP ont donné naissance au LIAFA.

La première étape fut de réunir un consensus sur quelques principes et sur un schéma d'organisation, consensus qui s'est ensuite matérialisé en un (épais) document de contractualisation (dans la cadre du contrat quadriennal de Paris-6 pour 1997-2000) qui a été remis aux autorités de tutelle en juillet 1996. Le LIP6 a été officiellement créé au 1er janvier 1997, UMR 7606. J'ai réussi à faire fonctionner cette lourde machine (350 personnes)
pendant un an et demi, jusqu'à moment où les problèmes du déménagement au CEA ont créé de telles tensions au sein du laboratoire
que j'ai estimé ne plus pouvoir poursuivre mon mandat. C'est Daniel Lazard qui m'a succédé.

Conclusion

Je suis probablement plus professeur que chercheur. C'est avec une certaine nostalgie que j'évoque les années lointaines
où le module de Compilation de licence recevait des louanges par écrit, de la part du bureau des étudiants (1990-91). Laudator temporis acti...
Ma plus grande réussite a sans doute été la direction du LAFORIA. C'est d'ailleurs au sein du Pôle IA du LIP6, qui en est le prolongement direct,
que j'espère passer un éméritat heureux !

Activités ultérieures

En matière de recherche, ma principale activité a été une collaboration avec Reza Razavi, un des derniers étudiants dont j'ai dirigé la thèse.
Il s'agit d'un projet de recherche financé par l'université du Luxembourg, qui a pris fin en 2006.
Il en est résulté une série de publications en commun, la dernière étant un exposé à un atelier à l'IJCAI 2007 à Hyderabad.

J'ai repris des activités d'enseignement, en Formation permanente à Paris-6 (programmation client-serveur) et dans d'autres institutions,
comme l'INaLCO (cours de Master sur la représentation des caractères), ou l'ISTM (cours de Java et de XML), .
Il m'est aussi arrivé d'enseigner l'intelligence artificielle à l'INSIA et par deux fois en Géorgie à la Filière francophone de l'Université technique.
Enfin, je suis depuis sa création président du conseil scientifique de l'EPITA.


Paris, 8/06/2007
J-F. Perrot